Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/232

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appelée à prononcer sur le tracé des défenses, et seule vider les différends que ces constructions peuvent soulever.

Enfin, pour épuiser ce sujet, je parlerai d’un dernier objet sur lequel je voudrais que l’attention de l’administration se fixât d’une manière toute spéciale.

On a vu combien, sur les terrains en pente, l’usage de la charrue est funeste à la stabilité du sol, et combien il serait nécessaire de faire intervenir là quelques restrictions, mûrement étudiées, et appliquées avec sagesse. On a vu aussi que les bois ne sont pas l’unique moyen propre à retenir les terrains mobiles ; que le gazon, la pelouse, les prairies, paraissent produire, partout où elles se développent, des effets tout aussi salutaires. — Il suit de là que la multiplication des prairies dans ce pays viendrait en aide aux travaux de reboisement, pour arrêter la destruction du sol végétal, et qu’il faudrait, par conséquent, provoquer par toutes les voies possibles cette sorte de culture, considérée comme complément des premiers travaux.

Or les prairies, qui sont le genre de culture le mieux approprié aux terrains en pente, sont aussi celui qui donne les plus forts revenus, et si les habitants ne l’adoptent pas partout, à l’exclusion de tout autre, cela tient uniquement à la disette de l’arrosage : partout, en effet, où il y a de l’eau, on ne voit plus que des prairies. — Le moyen infaillible de multiplier ici les prairies serait donc de multiplier les canaux d’irrigation.

C’est ici que l’intervention de l’État serait encore une fois nécessaire. — Pour donner l’impulsion à ces travaux, l’État aurait besoin de prendre une sorte d’initiative. Il favoriserait la formation des syndicats, en étendant l’influence des préfets, et anéantissant par là cette multitude d’oppositions qui surgissent, comme une force de frottement, au milieu des opérations les plus utiles, lorsqu’elles exigent l’association d’un grand nombre de volontés et de bourses. Il prêterait aux habitants le secours de ses ingénieurs, pour étudier les tracés, et diriger l’exécution des travaux. Il pourrait aussi, par des encouragements, venir à l’aide des syndicats pauvres. Il pourrait enfin provoquer, par des subventions, la formation de compagnies qui, faisant exécuter à leurs frais le canal, et vendant ensuiteen détail l’arrosage aux propriétaires, trouveraient certainement de bons bénéfices à cette spéculation, comme le démontre l’expérience de plusieurs entreprises semblables.

Qu’on se figure un instant tous ces revers, aujourd’hui si desséchés et