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C’est le sujet le plus ordinaire de ces archives, durant plus de cinq siècles. Il a provoqué plusieurs excommunications dressées en bonne forme. On peut voir là, par une foule de traits, que les forêts étaient déjà à cette époque une chose rare et précieuse.

Un édit de Humbert Dauphin interdit les défrichements dans le Briançonnais, « … pour résister aux avalanches et autres incommodités… » Donc l’abus des défrichements était déjà connu alors (xive siècle).

On a découvert l’existence d’une grande corporation de bateliers, établie sur la Durance, du temps de la domination romaine. Cela prouve qu’il y avait alors sur cette rivière un flottage considérable qu’on peut considérer comme totalement abandonné depuis longtemps. Cela prouve aussi que ce département était alors couvert d’abondantes forêts, dont il ne reste aujourd’hui que de maigres lambeaux.


NOTE 16.

Opinion de Fabre sur les causes des torrents et sur les effets qui en résultent.
Chap. XXIX, page 144.

Ce qu’on va lire est tiré de son Essai, pages 64 et suivantes.

144. « La destruction des bois qui couvraient nos montagnes est la première cause de la formation des torrents.

» La raison s’en présente d’elle-même. Ces bois, soit taillis, soit de haute-futaie, interceptaient, par leur feuillage et par leurs branches, une partie considérable des eaux pluviales et de celles d’orage. La partie restante, et qu’ils ne pouvaient pas retenir, ne tombait que goutte à goutte, et dans des intervalles assez longs pour qu’elle eût le temps, de filtrer dans les terres. D’autre part, la couche de terre végétale, qui s’accroissait annuellement par la chute des feuilles, s’imbibait d’une quantité considérable de ces eaux. Enfin les touffes d’arbrisseaux rompaient et détruisaient, dès leur origine, les torrents qui pouvaient se former nonobstant toutes ces raisons. Les bois étant détruits, les eaux d’orage n’ont plus trouvé d’interception dans leur chute. Ne pouvant pas, à raison de leur abondance, être absorbées par la terre à mesure qu’elles tombaient, elles ont coulé superficiellement, et, n’y ayant plus de touffes qui rompissent et divisassent leur cours, elles ont formé les torrents, ainsi qu’il a été dit.

145. « Les défrichements sur les montagnes sont la seconde cause de la formation des torrents.

» Car nous avons démontré qu’un torrent se formerait avec d’autant plus de facilité, que les matières qui composeraient la montagne auraient moins de ténacité. Or, les défriche-