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i&0 ÛEUXtËME PARTAGE DE LA POLOGNE.

ments ëomptueu’x étaient souvent couvertsde vermine, ctFusag’i: des mouchoirs était un luxe inconnu (1). Ce que l’eau-de-vie était pour les basses classes, le tokai l’était pour les classes supérieures de la société, et à l’ivresse succédait !o jeu, ajuquel les hommes et les femmes de tout âge se livraient avec une passion effrénée. Les relations’sociales séduisaient chez eux par une absence complète de contrainte et d’apprêt, dont les étrangers, les Allemands surtout, étaient tout d’abord charmés mais cette liberté dégénérait vite en licence, et le ton de la société, même élégante, était avili par l’influence de la servitude. Ainsi qu’il arrive toujours, l’esclavage, qui habitue à considérer des créatures humaines comme des êtres d’une nature inférieure, avait enlevé aux seigneurs eux-mêmes ce qui est la base de toute morale, la pudeur. Le mariage avaitperdu touteautoritéettoute sainteté. Les jeunes filles ne se mariaient que pour acquérir plus de liberté aussi rien n’était-il plus fréquent que la rupture d’unions ainsi contractées (2) on pouvait connaître une femme pendant des années entières, sans savoir si elle était séparée de son mari, ou combien elle en avait déjà eu (3). Enfin, pour compléter ce sombre tableau, Lafontaine, le médecin du roi, nous apprend que le pays était infesté par des maladies honteuses, que les pères transmettaient à leurs enfants, ou que ceux-ci suçaient avec le lait de leur nourrice (~)).

Est-il nécessaire de dire quelle était l’administration d’un État gouverné par de tels hommes, de présenter partout le tabieau de la même dissolution, dans la justice, dans les finances, dans l’administration, dans l’armée, de dépeindre partout les mêmes violences et le même égoïsmc? Tous les nobles polonais étaient pleins d’ardeur patriotique, prêts à combattre pour la république polonaise et à mourir pour leur patrie mais bien peu eussent été capables de sacrifier au bien public leur paresse, leur inconstance, leurs jouissances et leurs avantages personnels. Faut-il s’étonner que ces gentilshommes ruinés dans leur santé, dans leur fortune et dans leurs mœurs, aient montré tour à tour à (1) Forster à Thérèse Ileyne, 24 janvier 1785.

(2) Forster à Thérèse Heyne, 22 jnnvicr 1785.

(3) Nouvelles de Pologne, I, 100.

(4) Sur cent recrées, on comptait quatre-vingts malades.