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452 RÈGNE DE LA TERREUR EN FRANCE.

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avaient blanchi ses cheveux; mais son attitude était si calme, si digne, si empreinte de résignation, qu’à sa vue un sentiment de pitié et de respect envahit tous les assistants. Cette émotion augmenta encore lorsque Hébert parut au nombre des témoins à charge. Il avait fait subir aux enfants de l’accusée, à un enfant de huit ans et à une jeune fille de douze, un cruel interrogatoire, et il avait réussi à faire signer par l’enfant, que son gardien, le cordonnier Simon, tantôt rouait de coups et tantôt enivrait à force d’eau-de-vie, un procès-verbal contenant contre la reine d’infâmes déclarations. La Municipalité avait approuvé cette conduite, le club des Jacobins avait applaudi à ses efforts, tout le parti enfin avait partagé la flétrissure due à une telle infamie. Maintenant Hébert venait devant le tribunal déshonorer la reine, avant de la mettre à mort, par l’accusation d’un’forfait inouï. Marie-Antoinette se tuL d’abord, puis, sommée de répondre, elle dit d’une voix étouffée par l’émotion < Une mère n’a rien à répondre à de telles accusations, j’en appelle à toutes les mères ’) Un sourd murmure se répandit alors dans la salle, et les juges n’osèrent aller plus loin. Lorsque Robespierre apprit ce qui venait de. se passer, il s’écria < Le misérable imbécile Il finira par faire de nos ennemis des objets de pitié )) La sentence était décidée d’avance; le 16 octobre, la tête de la reine tomba sur l’échafaud. Quinze jours plus tard, ce fut le tour des Girondins prisonniers, de Vergniaud, de Brissot et de dix-huit de leurs amis. Ils se montrèrent sans dignité pendant les débats, se rejetèrent mutuellement des fautes qui avaient fait jadis l’orgueil de leur politique, et ne retrouvèrent leur fermeté et leur ûerté que pour marcher à la mort. Les longueurs de ce procès décidèrent le tribunal à demander à la Convention d’abréger les formalités légales Robespierre fit donc rendre un décret en vertu duquel, après trois jours de débats, les jurés pouvaient en finir et déclarer leur conviction établie. A travers les formes hypocrites et les apparences de légalité que conservaient les juges, on voyait, leur but politique percer plus ouvertement chaque jour. Avant la fin de l’année, le tribunal avait déjà envoyé cent vingt victimes à l’échafaud. De ce nombre était madame Roland; après la chute de son parti, elle avait fait le sacrifice de tout intérêt personnel, de toute ambition, de tout bonheur, de sa vie même, et tandis