Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/617

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Mais ils ne savoient pas que dans la juste crainte
Dont on a vu pour moi l’impératrice atteinte,
Des plus zélés des miens quelque nombre sans bruit
Par son appartement dans le mien introduit,
Dedans mon cabinet armé pour ma défense,
Contre la trahison faisoit mon assurance.
Marcellin par mon ordre au dehors demeuré,
étoit trompé lui-même, et l’avoit ignoré,
Et n’ayant avec lui que deux des siens pour suite,
À me laisser périr voyoit sa foi réduite ;
Lors qu’entrez en tumulte, et leurs indignes cris
Nous ayant fait songer à n’être point surpris,
De Marcellin à peine ils bravent l’impuissance,
Qu’il nous voit tout à coup sortir à sa défense.
Ce secours imprévu les ayant étourdis,
Fait d’abord à nos pieds tomber les plus hardis.
L’effroi suit aussitôt leur attente trompée,
Et ton fils de l’un d’eux ayant saisi l’épée,
Les yeux étincelants d’une illustre fureur,
Quoi, vive Eucherius, et meure l’empereur,
Traîtres ? et de l’effet la menace est suivie.
Son bras n’attaque point qu’il n’en coûte une vie ;
Il pousse, il frappe, il tue, et par de si grands coups,
L’avantage du nombre est tout entier pour nous.
C’est alors que cédant à l’ardeur d’un beau zèle,
Pour des lâches, dit-il, cette mort est trop belle,
Nos mains à trop d’entr’eux ont ouvert le tombeau ;
Réservons ce qui reste à celles d’un bourreau,
Sous l’horreur des tourments qu’ils parlent, qu’ils m’accusent.
De leur dernier espoir ces mots les désabusent,
Chacun cherche une mort qu’il ne peut obtenir,
On épargne leur vie afin de les punir,
On les met hors d’état d’aucune résistance,
Et leur parti par-là demeurant sans défense,
Les derniers qu’à l’instant Eucherius poursuit
N’espèrent qu’en la fuite où leur sort les réduit.