Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/544

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Léon.

Votre amour…Qu’il doit m’être doux & glorieux ;
S’il triomphe aujourd’hui, que ce soit à vos yeux !
Mais je veux avec vous bannir toute contrainte.

Roger.

Suis-je si malheureux que…

Léon.

Suis-je si malheureux que…Parlez-moi sans feinte.
Une étroite amitié s’est formée entre nous.
Ce qu’elle peut sur moi, le peut-elle sur vous ?

Roger.

Vous n’en sauriez douter sans me faire un outrage,
Seigneur, & s’il s’agit, par un prompt témoignage,
D’affronter cent périls…

Léon.

D’affronter cent périls…Vous pouvez m’obliger,
Mais n’appréhendez point de vous trop engager.

Roger.

Quel service assez grand pour vous me peut suffire ?
Je dois à vos bontés le jour que je respire.
Sans votre heureux secours une cruelle mort
Par une main infâme eût terminé mon sort.
Pour payer ce bienfait, expliquez-vous de grace,
Ordonnez, il n’est rien que pour vous je ne fasse.
J’en jure par la foi qu’en ce que j’ai promis
L’honneur me fait garder jusqu’à mes ennemis ;
Elle est inviolable.

Léon.

Elle est inviolable.Après cette assurance,
Je vais vous faire voir quelle est ma confiance.
J’aime, & pret d’entreprendre un important combat,
Quand je vois contre qui, mon cœur tremble & s’abat.
Pour m’épargner ce trouble & finir mes alarmes,
Il faut, Hyppalque, il faut vous cacher sous mes armes,
Combattre Bradamante, & contre elle en ce jour
Par un heureux triomphe assurer mon amour.