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Page:Tabourot - Les Bigarrures et Touches du seigneur des Accords - 1640.djvu/32

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De ma part y ayant bien pensé, je ne trouve rien qui que par les caracteres des lettres un homme seul a pouvoir de faire entendre ses conceptions à plus de cent mille personnes esloigneés & absentes les unes des autres ? que par icelle nous voyons representez, comme en un miroir, tous les gestes des anciens Capitaines, & doctrine des sçavans personnages ? Bref quelles nous donnent la cognoissance de tous les arts, qui font l’homme devenir vray homme. Je n’allegueray la necessité des contrats, à cause de l’imbecilité de nostre mémoire, & l’infidelité des hommes, ny tout ce qu’un homme de loisir en pourroit dechiffrer. Car c’est chose trop notoire que les Lettres d’elle mesme se loüent assez, & ne peut personne ignorer ses louanges, sinon les ignares, qui sont indignes de les sçavoir. Pour ceste rison je ne mespancheray pas plus avant sur icelles, & me contenteray de toucher ses inventeurs, afin de remercier ceux, par le moyen desquels je parleray avec toy, quiconque tu sois, qui voudras prendre la peine de lire icy dedans. Leur origne donc est attribuée par les Autheurs Etniques diversement. Les uns disent, que Memnon les trouva premièrement en Égypte ; autres accordent du lieu, mais asseurent que Mercure en fut l’autheur. Platon encor en attribuë l’invention à un nommé Thetase : autres disent qu’elles furent trouveés en Ethiopie : Plusieurs encor maintiennent que les Phœniciens furent les vrays inventeurs : tantost les Phrygiens, Syriens, & Assyriens. Esquelles diversitez il est impossible de recognoistre la verité. Il est beaucoup plus vraysemblable, selon l’opinion de Josephe, que Loth en ait esté l’inventeur, & pense qu’il faut faire doute que les premières Lettres, comme aussi le premier langage, ne fussent Hebraïques. Dequoy nous rend un tres-certain & asseuré tesmoignage la continuation de leur histoire