Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/234

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leurs Sarmates. Ceux qui arrivaient aux Parthes étaient au contraire facilement arrêtés : l’ennemi occupait tous les passages ; le seul qui restât entre la mer et les dernières montagnes d’Albanie était impraticable à cause de l’été, car alors les vents étésiens submergent cette côte. C’est en hiver seulement, lorsque le vent du midi refoule les eaux et fait rentrer, la mer dans son lit, que les grèves sont découvertes.

   9. L’espace qui sépare la mer Caspienne du Pont-Euxin forme une espèce d’isthme au travers duquel le Caucase s’élève comme une muraille immense. Les divers passages de cette montagne ont reçu des anciens le nom de portes : ce sont les portes Caucasiennes, Albaniennes, Ibériennes. Le nom de portes Caspiennes est appliqué vaguement par les Romains à plusieurs de ces défilés, quoiqu’il appartienne proprement à un passage beaucoup plus au sud, dans le mont Caspius, entre la Médie et le pays des Parthes.
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Orode était ainsi privé de secours. Pharasmane, appuyé de ses auxiliaires, lui présente la bataille, et, voyant qu’il l’évitait, il le harcèle, insulte son camp, massacre ses fourrageurs ; souvent même il l’environne d’une ceinture de postes et le tient comme assiégé. Enfin les Parthes, peu faits à souffrir l’outrage, entourent leur roi et lui demandent le combat. Toute leur force consistait en cavalerie. Pour Pharasmane, il avait aussi des gens de pied. Car les Ibériens et les Albaniens habitant un pays de montagnes, supportent mieux une vie dure et des travaux pénibles. Ils se disent issus de ces Thessaliens qui suivirent Jason, lorsque après avoir enlevé Médée et en avoir eu des enfants il revint, à la mort d’Éétès, occuper son palais désert et donner un maître à Colchos. Le nom de ce héros se retrouve partout dans le pays, et l’oracle de Phrixus y est révéré. On n’oserait y sacrifier un bélier, animal sur lequel ils croient que Phrixus passa la mer, ou dont peut-être l’image décorait son vaisseau. Les deux armées rangées en bataille, le Parthe vante à ses guerriers l’éclat des Arsacides, et demande ce que peuvent, contre une nation maîtresse de l’Orient, l’Ibérien sans gloire et ses vils mercenaires. Pharasmane rappelle aux siens qu’ils n’ont jamais subi le joug des Parthes ; que, plus leur entreprise est grande, plus elle offre de gloire au vainqueur, de honte et de péril au lâche qui fuirait. Et il leur montre, de son côté, des bataillons hérissés de fer, du côté de l’ennemi, des Mèdes chamarrés d’or ; ici des soldats, là une proie à saisir.

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Mais ce n’était pas la voix seule du chef qui animait les Sarmates. Ils s’excitent l’un l’autre à ne pas engager l’action avec leurs flèches, mais à s’élancer et à fondre inattendus sur l’armée ennemie. La bataille offrit un spectacle varié. Le Parthe, également exercé à poursuivre et à fuir, se débande, prend de l’espace pour mesurer ses coups. Les Sarmates, renonçant à leurs arcs,