Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/263

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pour ce jour-là seul, le commandement des soldats à l’un de ses affranchis, et il offre de s’en charger ; puis, craignant que, sur la route, les dispositions de Claude ne soient changées par L. Vitellius et Largus Cécina, il demande et prend une place dans la voiture qui les portait tous trois.

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On a souvent raconté, depuis, qu’au milieu des exclamations contradictoires du prince, qui tantôt accusait les dérèglements de sa femme, tantôt s’attendrissait au souvenir de leur union et du bas âge de leurs enfants, Vitellius ne dit jamais que ces deux mots : "O crime ! ô forfait ! " En vain Narcisse le pressa d’expliquer cette énigme et d’énoncer franchement sa pensée, il n’en put arracher que des réponses ambiguës et susceptibles de se prêter au sens qu’on y voudrait donner. L’exemple de Vitellius fut suivi par Cécina. Déjà cependant Messaline paraissait de loin, conjurant le prince à cris redoublés d’entendre la mère d’Octavie et de Britannicus ; mais l’accusateur couvrait sa voix en rappelant Silius et son mariage. En même temps, pour distraire les yeux de Claude, il lui remit un mémoire où étaient retracées les débauches de sa femme. Quelques moments après, comme le prince entrait dans la ville, on voulut présenter à sa vue leurs communs enfants ; mais Narcisse ordonna qu’on les fit retirer. Il ne réussit pas à écarter Vibidia, qui demandait, avec une amère énergie, qu’une épouse ne fût pas livrée à la mort sans avoir pu se défendre. Narcisse répondit que le prince l’entendrait, et qu’il lui serait permis de se justifier ; qu’en attendant la vestale pouvait retourner à ses pieuses fonctions.

Mise à mort du "mari" et de ses complices

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Claude gardait un silence étrange en de pareils moments. Vitellius semblait ne rien savoir. Tout obéissait à l’affranchi. Narcisse fait ouvrir la maison du coupable et y mène l’empereur. Dès le vestibule, il lui montre l’image de Silius le père, conservée au mépris d’un sénatus-consulte ; puis toutes les richesses des Nérons et des Drusus, devenues le prix de l’adultère. Enfin, voyant que sa colore allumée éclatait en menaces, il le transporte au camp, où l’on tenait déjà les soldats assemblés. Claude, inspiré par Narcisse, les harangue en peu de mots ; car son indignation, quoique juste, était honteuse de se produire. Un long cri de fureur part aussitôt des cohortes elles demandent le nom des coupables et leur punition. Amené devant le tribunal, Silius, sans chercher à se défendre ou à gagner du temps, pria qu’on hâtât sa mort. La même fermeté fit désirer un prompt trépas à plusieurs chevaliers romains d’un