Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/223

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électrisé par des convives qui partagent si bien nos jouissances ! En voyant ces heureux de la terre, on n’imagine pas qu’aucun soin, aucun trouble puisse altérer cette suprême béatitude ; mais on imagine bien que celui qui l’a peinte d’une façon si étonnante, devoit lui-même l’avoir sentie ; cela est d’autant plus vraisemblable, que Jordaens étoit robuste et d’une grande gaieté.

S’il n’eût cherché à rendre que de pareilles scènes, et n’eût choisi ses héros que dans les salles à manger, au milieu des pots et des verres, on l’auroit mis dans la classe des peintres les plus parfaits ; mais comme il a fait beaucoup d’autres sujets, beaucoup de scènes héroïques, où la noblesse, l’élévation, l’onction sont essentielles ; comme il a offert souvent le bas et le ridicule, au lieu du noble et du pathétique, la postérité, en le jugeant, l’a vu à la place où il s’étoit mis le plus souvent : cette place est encore un rang très-distingué parmi les fameux artistes de l’Europe.