Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/198

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dure si diversifiée, si épanouie, si confiante sous cette douce pluie de rayons chauds qui la caressaient. L’air était si pur, la lumière si amplement épanchée, la campagne si florissante et si heureuse ! À chaque chêne, à chaque châtaignier qui passait, chacun avec sa pose et dans son petit monde de compagnons et de voisins, je me sentais touché comme par la rencontre d’un être animé. J’avais envie de lui crier : « Tu te portes bien, tu es un beau et puissant chêne, tu es fort, tu jouis du luxe et de la magnificence de ton feuillage ». Je considérais les bouleaux, les frênes, comme des créatures délicates, de vraies femmes pensives, dont personne n’avait entendu la pensée, une pensée timide et gracieuse qui m’arrivait avec leurs chuchotements et l’agitation de leurs fins rameaux. Il y avait des douceurs ou des coquetteries d’arbres dans les creux ombragés, sur les tapis de bruyères rousses et violettes, dans les sentiers tortueux laissant voir un morceau de leur ruban de sable, au bord d’une petite source qui noircissait le sol entre les pierres, et tout d’un coup descendait avec des étincelles