Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/272

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l’autre, en sorte qu’il a fallu les étançonner par des poutres transversales. — On découvre des escaliers bossus, étriqués, des recoins et profondeurs inexprimables, des bouts de cours et de ruelles, un pêle-mêle biscornu. — Voilà les restes du Moyen âge, la fantaisie et l’anti-hygiène.

Contre le vent et la pluie continuelle, beaucoup de maisons sont caparaçonnées d’ardoises, flancs et toitures ; ces ardoises demi-cassées, moussues, brandillent, et la maison a l’air d’un lézard demi-écaillé. Dans les plus vieilles, sur la place du marché, la façade est en pignon et l’originalité élégante se montre. La tête de la maison se hérisse écailleuse sous ses ardoises bleuâtres, au-dessus des torchis jaunes et des fenêtres à petits carreaux. Au sommet du pignon, une statue de saint, une fleur sculptée monte dans l’air comme l’insigne ou la divinité tutélaire de la maison. Le bâtiment est un être bizarre, souffreteux, contrefait parfois, mais il vit.

Un galetas poétique, voilà bien le Moyen âge ; près de Saint-Pierre, au tournant d’une rue, les deux gouttières des deux maisons opposées se rencontraient.