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LE RÉGIME MODERNE


semblés dans la même main, tous les pouvoirs locaux conférés par le pouvoir du centre, et, pour exercer ce pouvoir suprême, un chef résolu, d’une intelligence aussi haute que sa place ; ensuite, une armée régulièrement payée[1], soigneusement équipée, suffisamment habillée et nourrie, exactement disciplinée, partant obéissante et capable de fonctionner sans écarts ni défaillances, comme un instrument de précision ; une gendarmerie et une police actives et tenues en bride ; des administrateurs indépendants de leurs administrés et des juges indépendants de leurs justiciables, tous délégués, soutenus, surveillés et contenus d’en haut, à peu près impartiaux, assez compétents, et, dans leur office circonscrit, bons fonctionnaires ; enfin, la liberté des cultes, par suite un traité avec Rome et la restauration de l’Église catholique, c’est-à-dire la reconnaissance légale de la hiérarchie orthodoxe et du seul clergé que les fidèles puissent

    aujourd’hui n’y mettre aucun intérêt. » — Rœderer, III, 484 (Rapport sur la sénatorerie de Caen, 1er décembre 1803) : « Le peuple des campagnes, concentré dans ses intérêts,… est profondément soumis, parce qu’il a maintenant sûreté pour les personnes et les propriétés…, Il ne s’exalte pas en louanges pour le monarque, mais il est plein de respect et de confiance pour un gendarme ; il s’arrête sur les chemins pour le saluer. »

  1. Rocquain, l’État de la France au 18 Brumaire (Rapport de Barbé-Marbois, 72, 81). Violation des caisses ; propos de quelques officiers : « Les richesses et la fortune sont pour les braves ; prenons : on trouvera nos comptes à la bouche de nos canons. » — « Les subalternes, ajoute Barbé-Marbois, bien instruits que leurs supérieurs puisent dans le Trésor public, leur font la loi pour avoir part au butin ; habitués à faire contribuer les ennemis du dehors, ils ne seraient pas éloignés de traiter en pays conquis les départements qu’ils sont chargés de défendre. »