Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 4, 1910.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
93
LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


nés se trouve souveraine. À leur tour, sous les yeux de leurs soldats qui restent immobiles, les trois officiers municipaux sont saisis, et, « la baïonnette sur la poitrine, ils signent, comme contraints, l’ordre de livrer au peuple M. Pascalis ». M. de la Roquette est livré par surcroît. « Ce qui a paru de la garde nationale d’Aix », c’est-à-dire la minorité jacobine, se forme en cercle autour de la porte de la prison, et s’érige en conseil de guerre : les voilà tout à la fois « accusateurs, témoins, juges et bourreaux ». Un capitaine emmène les deux condamnés sur le cours ; ils sont pendus. Presque aussitôt le vieux M. de Guiramand, que la garde nationale de son village amenait prisonnier à Aix, est pendu de même. — Aucune information contre les assassins : le nouveau tribunal, effrayé ou prévenu, s’est rangé depuis longtemps dans le parti populaire ; en conséquence, c’est contre les opprimés, contre les membres du cercle lapidé, qu’il instrumente. Décrets de prise de corps ou d’ajournement personnel, perquisitions, saisies de correspondances, les procédures pleuvent sur eux. Trois cents témoins sont interrogés. Des officiers arrêtés sont « chargés de chaînes et jetés dans les cachots ». — Désormais le club règne et « fait trembler tout le monde[1] ». — « Du 23 au 27 décembre, plus de deux mille passeports sont délivrés à Aix. » — « Si les émigrations continuent, écrivent les commissaires, il ne restera plus bientôt à Aix que des

  1. Archives nationales, F7, 3195. Lettres des commissaires, 11 février, 20 mars, 10 mai 1791.