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LA RÉVOLUTION


M. d’Escayrac, abandonné par la municipalité de son village, blessé, se retire en Languedoc chez le comte de Clarac, maréchal de camp. Là aussi, le château est entouré[1], bloqué, assiégé par la garde nationale du lieu. M. de Clarac descend, parlemente ; on lui tire des coups de fusil. Il remonte et jette de l’argent par la fenêtre ; on ramasse l’argent et l’on tire de nouveau sur lui. Le feu est mis au château ; M. d’Escayrac est tué de cinq coups de fusil : M. de Clarac et un autre, réfugiés dans un souterrain voûté, presque étouffés, n’en sont retirés que le surlendemain matin par les gardes nationales du voisinage ; celles-ci les emmènent à Toulouse, où on les retient en prison, et où l’accusateur public informe contre eux. En même temps, le château de Bagat, près de Montcuq, est démoli ; l’abbaye d’Espagnac, près de Figeac, est attaquée à coups de fusil ; on force l’abbesse à restituer toutes les rentes qu’elle a perçues et à rembourser quatre mille livres pour les frais d’un procès que le couvent a gagné il y a vingt ans.

Après de pareils succès, il est inévitable que la révolte s’étende, et, au bout de quelques semaines ou de quelques mois, elle est permanente dans les trois départements voisins. — Dans la Creuse[2], on menace les juges de mort s’ils ordonnent le payement des cens, et l’on

  1. 7 janvier 1791.
  2. Archives révolutionnaires du département de la Creuse, par Duval (lettre des administrateurs du département, 31 mars 1791). — Archives nationales, F7, 3209. Délibération du directoire du département, 12 mai 1791. — Procès-verbal de la municipalité de La Souterraine, 23 août 1791