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LA RÉVOLUTION


avertit que « l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de l’homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements ». Elle déclare que « le but de toute association politique est la conservation de ces droits naturels et imprescriptibles ». Elle les énonce « afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif puissent être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique ». Elle veut « que sa déclaration soit constamment présente à tous les membres du corps social ». — C’est nous dire de contrôler les applications par le principe, et nous fournir la règle d’après laquelle nous pourrons et nous devrons accorder, mesurer ou même refuser notre soumission, notre déférence, notre tolérance aux institutions établies et au pouvoir légal.

Quels sont-ils, ces droits supérieurs, et, en cas de contestation, qui prononcera comme arbitre ? — Ici rien de semblable aux déclarations précises de la Constitution américaine[1], à ces prescriptions positives qui peuvent servir de support à une réclamation judiciaire, à ces interdictions expresses qui empêchent d’avance plusieurs sortes de lois, qui tracent une limite à l’action des pouvoirs publics, qui circonscrivent des territoires

  1. Cf. la Déclaration d’indépendance du 4 juillet 1776 (sauf la première phrase, qui est une réclame de circonstance à l’adresse des philosophes européens). — Pour la Constitution du 4 mars 1789, Jefferson proposa une Déclaration des Droits qui fut refusée. On se contenta d’y ajouter les onze amendements qui énoncent les libertés fondamentales du citoyen.