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LA RÉVOLUTION


fit pour provoquer le meurtre. Le 19 août, à Auxerre, pendant le défilé de la garde nationale, trois citoyens, après avoir prêté le serment civique, « ont quitté leurs rangs », et, comme on les rappelle « pour les faire rejoindre », l’un d’eux, par impatience ou mauvaise humeur, « fait un geste indécent » ; à l’instant, la populace qui se croit insultée, fond sur eux, écarte la municipalité et la garde nationale, blesse l’un et tue les deux autres[1]. Quinze jours après, au même endroit, de jeunes ecclésiastiques sont massacrés, et « le cadavre de l’un d’eux reste trois jours sur un fumier, sans qu’on permette à ses parents de l’enterrer ». Presque à la même date, dans un village de sabotiers à cinq lieues d’Autun, quatre ecclésiastiques munis de passeports, parmi eux un évêque et ses deux grands vicaires, ont été arrêtés, puis fouillés, puis volés, puis assassinés par les paysans. — Au-dessous d’Autun, notamment dans le district de Roanne, les villageois brûlent les terriers des propriétés nationales ; les volontaires rançonnent les propriétaires ; les uns et les autres, ensemble ou séparés, se livrent

    pagnes arrêtent les personnes qui leur sont suspectes, et, au lieu de les surveiller elles-mêmes, les conduisent au district. » — Ces emprisonnements arbitraires se multiplient à la fin de 1792 et dans les premiers mois de 1793. Les commissaires de la Convention font arrêter à Sedan 55 personnes en un jour, à Nancy 104 en trois semaines, à Arras plus de 1000 en deux mois, dans le Jura 4000 en deux mois. À Lons-le-Saulnier, tous les nobles avec leurs domestiques, à Aix, tous les habitants d’un quartier, sans exception, sont mis en prison. (Sybel, II, 305.)

  1. Archives nationales, F7, 3276. Lettres des administrateurs de l’Yonne, 20 et 21 août. —Ib., F7, 3255. Lettre du commissaire Bonnemant, 11 septembre. — Mortimer-Ternaux, III, 338. — Lavalette, Mémoires, I, 100.