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LES GOUVERNÉS


confiner dans leur cachot ou dans leur chambrée, on les laisse deux ou trois nuits, pêle-mêle, dans une salle basse sur des bancs, ou dans la cour sur le pavé, « sans lits ni paille »… — « On les tourmente dans toutes leurs affections et, pour ainsi dire, dans tous les points de leur sensibilité. On leur enlève successivement leurs biens, leurs assignats, leurs meubles, leurs aliments, la lumière du jour et celle des lampes, les secours réclamés par leurs besoins et leurs infirmités, la connaissance des événements publics, les communications, soit immédiates, soit même par écrit, avec leurs pères, leurs fils, leurs épouses[1]. » On les oblige à payer leur logement, leurs gardiens, leur nourriture ; on leur vole à la porte les vivres qu’ils font venir du dehors ; on les fait manger à la gamelle ; on ne leur fournit que des aliments insuffisants et dégoûtants, « morue pourrie, harengs infects, viande en putréfaction, légumes absolument gâtés, le tout accompagné d’une demi-chopine d’eau de la Seine, teinte en rouge au moyen de quelques drogues ». On les affame[2], on les

    premières à passer au rapiotage. » (Prisons d’Arras et prison du Plessis à Paris.)

  1. Documents sur Daunou, par Taillandier (Récit de Daunou, qui a été détenu tour à tour à la Force, aux Madelonnettes, aux Bénédictins anglais, à l’Hôtel des Fermes et à Port-Libre). — Sur le régime des prisons, cf., pour Toulouse, Tableau des prisons de Toulouse, par Pescayre ; pour Arras et Amiens, Un séjour en France de 1792 à 1795 et les Horreurs des prisons d’Arras ; pour Lyon, Une famille sous la Terreur, par Alexandrine des Écherolles ; pour Nantes, le Procès de Carrier ; pour Paris, Histoire des prisons, par Nougaret, 4 vol., et Mémoires sur les prisons, 2 vol.
  2. Témoignages du représentant Blanqui, détenu à la Force ; du