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LA RÉVOLUTION


suffit d’avoir la pièce, pour connaître tous les notables et les plus honnêtes gens de l’endroit ; dès lors, sous prétexte d’une répression politique, les niveleurs peuvent donner carrière à leur haine sociale. — À Montargis, neuf jours après l’attentat du 20 juin 1792[1], 228 notables ont signé une adresse pour témoigner au roi leur sympathie respectueuse ; vingt et un mois plus tard, par un coup rétroactif, on les frappe, et avec d’autant plus de plaisir que visiblement on frappe en eux les personnes les plus considérées de la ville, tout ce que la fuite et le bannissement y ont laissé d’aristocratie noble, ecclésiastique, bourgeoise ou populaire. Déjà, « lors de l’épuration des autorités constituées de Montargis, le représentant avait retiré aux signataires la confiance publique et les avait repoussés de toutes les fonctions ». Mais cela ne suffit pas ; le châtiment doit être exemplaire. — Quatre d’entre eux, l’ex-maire, l’ex-receveur, un administrateur du district, un notable, sont envoyés au Tribunal révolutionnaire de Paris, pour y être guillo-

  1. Archives nationales, AF, II, 116 (Procès-verbal de la séance publique du 20 ventôse an II, tenue à Montargis, au temple de la Raison, par Benou, « agent national de la commune et agent particulier du représentant du peuple ». — Arrêtés antérieurs et ultérieurs du représentant Lefiot). — Ont signé 86 personnes soumises à la pénitence publique, parmi elles 24 femmes ou veuves ; ce qui, avec les quatre signataires envoyés au tribunal de Paris et les 32 reclus, fait 122. — Très probablement, les 106 qui manquent pour parfaire le chiffre de 228, avaient émigré, ou avaient été bannis, comme prêtres insermentés, dans l’intervalle. — Ib., DS, I, 10 (Arrêtés de Lacroix, Louchet et Legendre, Conches, 8 et 9 frimaire an II). Incarcération des officiers municipaux de Conches, pour une pétition analogue et autres marques de feuillantisme.