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LA RÉVOLUTION


— « Sur 1660 habitants de Brionne, 1360[1] sont réduits à la petite portion de blé qu’ils reçoivent de la halle, et qui, depuis malheureusement trop longtemps, ne se porte qu’à 8, 7, 6 ou 5, 4, 3 onces de blé pour chaque individu tous les huit jours. » — Depuis trois mois dans Seine-et-Marne[2], « la commune de Meaux, celles de la Ferté, Lagny, Dammartin et les autres chefs-lieux de canton n’ont par tête et par jour qu’une demi-livre de mauvais pain ». — Dans Seine-et-Oise, des citoyens des environs de Paris et même de Versailles[3], disent qu’ils sont réduits à un quarteron de pain ». À Saint-Denis[4], qui contient six mille âmes, une grande partie des habitants, exténués de besoin, se rendent dans les maisons de secours ; les ouvriers surtout ne peuvent se livrer à leurs travaux, faute de nourriture ; plusieurs femmes, mères, nourrices, ont été trouvées chez elles sans connaissance ni aucun signe de vie, et plusieurs sont mortes avec leurs enfants à la mamelle ». Même dans une ville plus

  1. Archives nationales, AF, II, 73 (Lettre de la municipalité de Brionne au district de Bernay, 7 prairial). Les cultivateurs n’apportent pas leur blé, parce qu’ils le vendent ailleurs, au taux de 1500 et de 2000 francs le sac de 330 livres.
  2. Ib., AF, II, 71 (Lettre du procureur-syndic du district de Meaux, 2 messidor) : « Beaucoup de communes rurales partagent leur sort » ; on a réduit tout le district à cette disette « pour augmenter les secours à fournir à Paris et aux armées ».
  3. Schmidt, Tableaux de Paris (Rapport de police, 6 pluviôse an III). — Ib., 16 germinal : « Une lettre du département de la Drôme apprend que l’on y meurt de faim, que le pain s’y vend 3 francs la livre. »
  4. Archives nationales, AF, II, 70 (Délibération du Conseil général de Franciade, 9 thermidor an III).