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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


rentre en fonctions ; et il semble que, par le 13 vendémiaire, la bande jacobine ait conquis la France une seconde fois.

IV

Non pas encore cependant, car, si elle a regagné l’autorité, elle n’a pas ressaisi la dictature. — Vainement Barras et Tallien, Dubois de Crancé, Merlin de Douai et M.-J. Chénier, Delmas, Louvet, Siéyès et leur séquelle, les grands pourris, les habitués du pouvoir, les théoriciens despotiques et sans scrupule, ont tâché de reculer indéfiniment l’ouverture du Corps législatif, de casser les élections, de purger la Convention, de rétablir à leur profit cette concentration totale des pouvoirs qui, sous le nom de gouvernement révolutionnaire, a fait de la France un pachalick aux mains de l’ancien Comité de Salut public[1] : la Convention a pris peur pour elle-même ; au dernier moment, le complot a été démasqué, le coup a manqué[2], la Constitution décrétée a été mise en jeu, le régime de la loi a remplacé le régime de l’arbitraire.

  1. Thibaudeau, Histoire de la Convention, I, 243 : « Tallien, Barras, Chénier et Louvet ne parlaient que d’annuler les élections… La barre et la tribune ne retentissaient plus que des propositions les plus révolutionnaires. La Montagne était d’une audace inouïe. Les tribunes publiques étaient garnies d’affidés, qui l’applaudissaient avec fureur… Tallien et Barras régnaient et se partageaient la dictature. Depuis le 13 vendémiaire, la Convention ne délibérait plus qu’au milieu d’un camp ; les alentours, les tribunes, la salle même étaient investis de militaires et de Terroristes. » — Mallet du Pan, Correspondance avec la cour de Vienne, I, 248 (Lettre du 31 octobre 1795).
  2. Thibaudeau, ib., I, 246 et suivantes. — Moniteur (séance du 1er brumaire). Discours de Thibaudeau.