Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 9, 1911.djvu/12

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avons vu la fin, et cela nous aide à en comprendre le cours. Au contraire, pour la période ultérieure, la fin nous manque ; les grandes institutions qui datent du Consulat et de l’Empire n’ont pas encore atteint leur terme historique, consolidation ou dissolution : depuis 1800, à travers huit changements du régime politique, tout l’ordre social a subsisté, presque intact. Quel en sera le succès ou l’insuccès définitif, nos enfants ou nos petits-enfants le sauront ; ayant vu le dénouement, ils auront pour juger le drame total des lumières que nous n’avons pas. Aujourd’hui, quatre actes seulement ont été joués ; nous ne pouvons que pressentir le cinquième. — D’autre part, à force de vivre dans cette forme sociale, nous nous y sommes accoutumés ; elle ne nous étonne plus ; si artificielle qu’elle soit, elle nous paraît naturelle ; nous avons peine à en concevoir une autre, plus saine ; bien pis, nous y répugnons : car une telle conception nous conduirait vite à une comparaison, par suite à un jugement, et, sur beaucoup de points, à un jugement défavorable, à une désapprobation motivée, non seulement de nos institutions, mais aussi de nous-mêmes. Appliquée sur nous pendant trois généra-