Page:Tallemant des Réaux - Historiettes, Mercure de France, 1906.djvu/237

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pour y accoucher. Neufchâtel l’y fut trouver, et après elle retourna en Champagne.

Voici qui est encore pis que tout le reste. Elle maria sa fille, qui n’avoit que onze ans, à Neufchâtel, et le baisoit devant tout le monde comme son gendre, et ils étoient tombés d’accord qu’il coucheroit trois fois la semaine avec elle et trois fois avec sa fille, et que le dimanche il se reposeroit. Elle ne s’en contenta pas, et ôta un jour à sa fille. Le mari, voyant que Neufchâtel avoit plus d’affaires que jamais, demandoit à coucher quelquefois avec sa femme, mais en vain. Il alla plusieurs fois la trouver, comme ils étoient au lit, pour tâcher d’obtenir qu’on le laissât coucher une heure seulement avec sa femme.

Une nuit qu’ils ne pouvoient dormir, ils allèrent fouetter ce pauvre homme pour se divertir.

Neufchâtel fut tué au blocus de Paris un an ou environ après qu’il se fut marié. Elle remaria sa fille aussitôt à un gentilhomme, nommé Juvigny, à condition que le père de ce garçon coucheroit avec elle ; mais elle le trouva bientôt trop vieux. Enfin elle en vint jusqu’à s’en faire donner par ses valets. Elle mourut, il y a cinq ans ou environ, âgée de trente-neuf à quarante ans.


SOUSCARRIÈRE

Il y avoit un pâtissier à Paris, à l’enseigne des Carneaux, qui traitoit par tête. Ce pâtissier avoit une femme assez jolie, à qui plusieurs personnes firent leur cour, et entre autres M. de Bellegarde. Vers le temps où ce dernier la fréquentoit, cette femme se sentit grosse et accoucha d’un fils. Ce garçon devint adroit à toutes sortes de jeux et d’exercices ; il étoit bien fait et heureux au jeu, il se pousse, il gagne.