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mour de paille, en je ne sais combien d’endroits, avec des chiffres de la même étoffe. Je ne sais quelle amitié il avoit pour la paille, mais il n’aimoit pas moins le vieux cuir doré[1], et n’avoit point d’autre tapisserie en été ni hiver.

Il fut un peu épris d’une de mes parentes, madame d’Harambure, qui étoit allée voir son jardin. Un jour il lui écrivit une lettre fort longue, où en un endroit il se fondoit furieusement en raison, car il lui disoit : « Encore que vous n’aimiez point les figues (elle n’en mangeoit point), elles ne laissent pas d’être friandes ; de même mon amour, quoique vous n’en fassiez point de cas, n’est pas pourtant méprisable ; » et au bas il y avoit : « Renvoyez-moi cette lettre, s’il vous plaît, car je n’en ai point de double. » N’étoit-ce pas là une bonne lettre à garder ?

Madame de Saint-Germain-Prévost, dont le fils se vantoit d’être le fils de M. le maréchal de Biron, est celle de qui on a le plus parlé avec le bonhomme. Elle sut un jour qu’il devoit donner la collation chez lui à des dames. Elle trouve moyen d’y entrer justement comme on venoit de servir, et que les gens étoient allés avertir la compagnie, et prenant la nappe par un bout, elle jeta tout à terre. Quand il vit cela, il se mit à rire et dit : « Il faut que madame de Saint-Germain soit venue ici. »

Mais l’amourette qui a fait le plus de bruit, est celle

  1. On appeloit ainsi des peaux de mouton passées en basanes, sur lesquelles étoient représentées en relief diverses sortes de grotesques relevées d’or ou d’argent, de vermillon ou autres couleurs (Dictionnaire de Trévoux). Voyez aussi les Recherches sur le cuir doré, par M. de La Querière ; Rouen, Baudry, 1830, in-8o.