Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/221

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qui avoit achevé de le charmer, c’est qu’étant tombé malade, avant qu’elle logeât avec lui, cette femme fut quarante jours sans se déshabiller. Croyez pourtant qu’elle achetoit bien son bonheur. Il falloit savoir du bon homme tous les matins comment elle se coifferoit, à la grecque, à l’espagnole, à la romaine, à la française, etc. ; quel habit elle prendroit ; si elle seroit reine, déesse, nymphe ou bergère. Elle accoucha dans sa maison de deux enfants, car celui dont elle étoit grosse quand ils firent connoissance n’a pas vécu. Le plus âgé de ces deux enfants est une fille, et l’autre un garçon ; nous parlerons d’elle ensuite, car le pauvre homme eut de grands procès à cause d’elle[1].

M. Des Yvetaux avoit un frère qui étoit lieutenant-général à Caen. Ce frère fit son fils conseiller, et puis maître des requêtes[2]. Ce M. le maître des requêtes prétendoit être seul héritier du bon homme, car il y avoit assez à espérer. Madame de Liancourt[3] lui avoit

  1. « Des Yvetaux, dit Ségrais, avoit épousé une mademoiselle Dupuis, joueuse de harpe, qui étoit d’Étampes, et qui avoit son frère qui en jouoit par les cabarets. Souvent ils prenoient la houlette avec le chapeau et l’habillement de bergers, et chantoient ensemble des vers que Des Yvetaux lui-même avoit composés. Il étoit encore vivant quand j’arrivai à Paris, mais je ne le vis pas ; il demeuroit au faubourg Saint-Germain, où il recevoit grande compagnie sans aller voir personne. » (Mémoires anecdotes de Ségrais ; Amsterdam, 1723, p. 115.) Tallemant entre dans des détails beaucoup plus étendus, et ayant connu personnellement Des Yvetaux, il mérite plus de confiance que Ségrais.
  2. Hercule Vauquelin, fils de Guillaume, devint intendant de Languedoc. (Voyez les Origines de Caen, par Huet, au lieu déjà cité.)
  3. Jeanne de Schomberg, mariée en secondes noces en 1620 à Roger Du Plessis de Liancourt, duc de La Roche-Guyon. Sa fille, Jeanne Charlotte Du Plessis Liancourt épousa en 1659 François VII, duc de La Rochefoucauld, prince de Marsillac, fils de l’auteur des Maximes. C’est