Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/297

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Pour les accommoder lui et M. de Sillery, à qui on donnoit les sceaux, on fit un mariage. Le fils du chancelier épousa la fille du garde-des-sceaux, qui étoit une demoiselle fort galante, et dans les visions de la cour, on mit que pour les mettre d’accord on avoit pris une fourche.

M. de Sillery Brulart fut chancelier après lui. On conte de lui une chose qui marque une grande douceur et une grande patience. Un jour, je ne sais quelle femme l’attendit à sa porte et lui chanta pouille. Il appela un homme qui étoit avec elle, et lui demanda s’il la connoissoit. « Oui, monsieur, lui répondit cet homme, c’est ma femme. — Et combien y a-t-il que vous êtes avec elle ? — Il y a dix ans, monsieur. — Vous devez, reprit-il, vous être bien ennuyé, car il n’y a qu’une demi-heure que j’y suis, et j’en suis déjà bien las. »

C’est lui qui a bâti Berny ; M. de Gèvres, secrétaire d’État, père de M. de Fresne, bâtissoit en même temps Sceaux, et chacun vouloit accroître sa terre. Henri IV leur défendit à tous deux d’acheter des héritages par-delà le chemin d’Orléans qui les sépare[1].

Le chancelier de Sillery maria son fils, M. de Pisieux, en secondes noces à mademoiselle de Valençay d’Étampes, sœur de feu M. l’archevêque de Reims dont nous parlerons ailleurs. Ce fils étoit un pauvre homme, mais il a gouverné quelque temps, étant secrétaire d’État.

M. de Pisieux n’ayant point eu d’enfants de son premier mariage, le chancelier ne souhaitoit rien tant que de

  1. Le château de Berny étoit en effet placé à l’autre côté du chemin d’Orléans, sur la paroisse d’Antony. Il ne reste plus de cette terre que quelques murs du parc.