« Sire, voyez ce méchant, ce perfide, ce scélérat ; il faut mettre M. d’Angoulême en sa place. » Le Roi se mit à rire avec eux, mais du bout des dents, et dit : « Il y a quelque temps que je m’aperçois que le pauvre Père Caussin s’affoiblit. » M. le comte d’Alais[1] eut pour cela le gouvernement de Provence.
Un peu après cela, comme M. d’Angoulême couroit un daim avec le Roi dans le bois de Vincennes, le Roi lui dit : « Bon homme, voyez-vous ce donjon ? il n’a pas tenu à M. le cardinal qu’on ne vous y ait mis. — Par le corps-dieu, Sire, dit le bon homme, je l’avois donc mérité, car il ne vous l’auroit pas conseillé autrement. »
Le Père Caussin est mort d’une bizarre manière[2]. Il se mêloit d’astrologie et trouva qu’il devoit mourir un certain jour ; et ce jour-là, sans autre mal, il se met en son lit et meurt. La Reine-mère croyoit aussi très-fort aux prédictions, et elle pensa enrager quand on l’assura que le cardinal prospéreroit et vivroit long-temps. La Reine-mère croyoit aussi que ces grosses mouches qui bourdonnent entendent ce qu’on dit et le vont redire, et quand elle en voyoit quelques-unes, elle ne disoit plus rien de secret.
Hocquincourt le père, grand-prévôt, ayant demandé
- ↑ Louis de Valois, comte de Lauraguais, d’Alais, etc., duc d’Angoulême après son père, obtint en 1637 la charge de colonel général de la cavalerie légère, et le gouvernement de Provence.
- ↑ Le Père Caussin fut exilé à Quimper-Corentin. (Voyez l’Histoire du ministère du cardinal Richelieu, par M. Jay, tom. 2, pag. 71 et suiv.) On trouve dans le même volume, pag. 307, une lettre très-curieuse du Père Caussin à madame Louise-Angélique de La Fayette, qui contient le récit des circonstances qui avoient déterminé celle-ci à se faire religieuse.