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c’étoit une médisance de province. Une baronne de La Roche-des-Aubiers, mère de cette jeune veuve, avoit été mariée fort long-temps sans avoir d’enfants. Enfin, un gentilhomme, nommé La Grise, se rendit familier dans la maison, et y gouvernoit tout. Incontinent madame devint grosse de madame Servien. Le mari meurt peu après ; La Grise épouse la veuve.

Le maréchal de Brézé disoit à La Grise : « Être cocu, ce n’est pas grande merveille ; mais il n’arrive guère qu’on le soit de la façon comme toi. » On dit aussi que madame d’Onzain aimoit Sévigny, dont nous parlerons ailleurs ; en sorte que la mère passoit bien des articles fâcheux que Servien proposoit exprès, parce qu’il n’y alloit pas de bon cœur, et que la belle accoucha au bout de sept mois. On disoit qu’elle étoit pressée de se marier. Au commencement elle le trouvoit vieux ; enfin, elle fut ravie de l’avoir.

Son retour et ses emplois aux pays étrangers, avec ses querelles avec M. d’Avaux et sa surintendance, se trouveront dans les Mémoires que la régence nous fournira.

Cette madame Bigot revint à Paris faute d’emploi pour son mari. Ici, Lyonne, qui avoit les mémoires de son oncle Servien, se mit à lui en conter. Il avoit une chambre chez elle, comme l’autre chez mademoiselle Vincent ; cela ne dura que deux ans, car on le maria. Depuis, son mari et elle, qui n’étoit plus jeune, ont bien eu de la peine à subsister, et Servien, tout surintendant qu’il est, n’en a aucun soin. Une fois pourtant il lui fit donner je ne sais quelle commission à l’armée navale. Un jour, dînant chez M. de Vendôme, ce sot homme s’avisa de dire qu’il y avoit bien de l’avantage à avoir