Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/394

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sieur, changez de place, dit-il à La Bazinière, je me veux mettre auprès d’elle. » Ils font collation ; au retour, il la fait monter dans son carrosse, et sur ce que Bazinière disoit qu’il en auroit la raison, il le fit environner de laquais qui le menacèrent du bâton. Le chevalier de Chémerault, aujourd’hui Chémerault, qui est gendre de Tabouret, car d’Émery lui fit donner la fille de ce partisan, fit appeler le duc de Brissac ; mais ils furent accommodés. Roquelaure se moqua des façons qu’avoit faites Brissac pour embrasser un gentilhomme, car en ce temps-là ils étoient encore infatués de Cocceius Nerva. Brissac l’envoie appeler par L’Aigle ; Roquelaure s’excusa sur la fièvre-quarte qu’il avoit depuis quelques mois. L’Aigle lui répondit que puisque, malgré sa fièvre, il jouoit, faisoit sa cour et soupoit en ville, on auroit sujet de prendre cela pour une méchante échappatoire. « Bien, dit Roquelaure, ne dites point que je vous ai dit cela ; dès que je me porterai tant soit peu mieux, car je n’ai point de force, je vous ferai savoir de mes nouvelles. » En effet, au bout de dix jours il envoya un brave nommé Champfleury[1] dire à L’Aigle qu’il se battroit devant les Feuillants. L’Aigle dit qu’on seroit trop tôt séparé ; qu’il valoit mieux aller au Cours. Comme ils y alloient, ils furent arrêtés. On disoit que madame de Mirepoix, sœur de Roquelaure, en avoit averti. Ce furent des gentilshommes de M. le Prince qui les arrêtèrent : ne les ayant pas trouvés au Cours, ils s’en retournoient quand ils virent passer un carrosse qui avoit les rideaux tirés ;

  1. Aujourd’hui capitaine aux gardes. Il a été capitaine des gardes du Mazarin. (T.)