Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/313

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fin rue Boccador, où j’ai tout ce qu’il me faut pour ma toilette ? Puis enfin, mes manuscrits sont là, ainsi que mes livres. La nourriture que vous savez si bien me préparer me remonterait, tandis qu’ici je ne guérirai jamais ! » J’étais obligé d’entendre cela, sans trouver un mot à répondre. Était-ce assez déchirant ? Comme d’habitude, je lui promis que notre retour rue Boccador ne tarderait pas. Je dois dire que les médecins me traitèrent toujours avec la même amabilité. Un jour, l’un d’eux me questionna sur le temps que j’avais passé au service de M. de Maupassant. Après un moment de conversation, il me dit : « Oui, je vous comprends, mon pauvre garçon, mais que voulez-vous… ? »


Septembre. — Mon maître ne parle plus maintenant de retourner chez lui… Un jour il me demande son ivoire ancien qu’il avait donné en grand mystère et il sourit ; malgré cela, il m’affirme ne pas savoir ce que le triptyque est devenu. Puis il se tourne vers Baron pour le prendre à témoin que ce qu’il avançait était vrai[1]. Ce gardien, aimable, souple et parfait dans son métier, avait conquis les bonnes grâces du malade ; il répond : « Mais certainement, François, M. de Maupassant a bonne mémoire, il se rappelle exactement ce détail et bien d’autres choses, comme vous avez pu le constater. »


Octobre. — Nous allons dans le jardin toutes les fois que le temps le permet. Les jours deviennent courts et sombres ; il y a déjà des brouillards sur les bords de la Seine. Aujourd’hui il fait mauvais, M. de Maupassant passe son temps au salon et joue au billard.

  1. Voir chap. xi.