Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/50

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

cassé, sauf deux petites statuettes plus solides qui avaient résisté. À la vue de ce désastre, mon maître devint tout rouge, mais il sut se maîtriser :

« Dans ce cas, dit-il, puisque ce n’était pas bien emballé, les compagnies de chemin de fer ne sont pas en faute, ce sont ces bougres de marchands ! Mais ce qu’il y a de plus fort c’est qu’ils ont dû se donner le mot pour mal emballer, car j’ai acheté ces bibelots un peu partout… À moins que ce ne soit la mode d’emballer ainsi dans leur pays. Ce sont des êtres si extraordinaires ! Ainsi on entre chez un de ces antiquaires, il vient d’abord un monsieur d’un certain âge vous demander ce que vous désirez. Puis se présente une dame d’âge mûr, ensuite arrive une seconde dame jeune et un autre monsieur, jeune aussi. Leurs politesses exagérées et leurs manières ne laissent aucun doute sur leurs propositions malhonnêtes. Ils sont révoltants, sales et répugnants. Avec cela, ils sont beaux comme leur pays, qui contient des merveilles, en palais et musées, on est obligé d’en convenir. Leurs musées renferment des richesses incalculables et sont de toute beauté, et autour de toutes ces choses si belles, grouille une populace immonde ; le contraste est frappant et triste. Toutes ces belles choses perdent beaucoup à être placées dans de tels milieux.


« Ah ! vous défaites ma malle, François ? Donnez-moi donc une pierre de soufre qui se trouve dans le fond. » Je la lui donne ; en la prenant, il s’aperçoit qu’elle commence à s’effriter :

« C’est moi qui suis allé la chercher au fond d’une mine. Nous sommes partis quinze ou seize pour y descendre. Je les ai tous semés en route. Seul avec le