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LES DIEUX S’EN VONT.


Il est trop vrai, la belle poésie,
Que nos aïeux voyaient sourire encor,
D’ennui, de doute, ou de frayeur saisie,
N’a plus pour nous qu’un seul et triste accord :
Un bruit plaintif s’échappe du navire
Prêt à sombrer dans l’abîme profond ;
La créature en expirant soupire :
Ne cherchez pas pourquoi gémit la lyre…
Les dieux s’en vont !

Que feraient-ils, quand pas une étincelle
Ne jaillirait des cœurs frappés en vain ?
Quand chaque jour ravit une parcelle
De ce qu’au monde il restait de divin ?
Sur les autels toute flamme allumée,
Cire grossière, en peu d’instans se fond,
La lampe sainte un moment ranimée,
Ne jette plus qu’une impure fumée…
Les dieux s’en vont !