Page:Tastu - Poésies nouvelles, 3ème édition, 1838.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
46
PEAU-D’ÂNE.

À vous, jeune homme, esprit chaud et candide !
Pour quelque mot qui vous monte au cerveau,
Sans mission, dans l’ardeur qui vous guide,
Vous combattez, Don Quichotte nouveau.
Cherchant de l’âme une âme où retentisse
Ces noms vibrans : Foi, Liberté, Justice !
Vous vous heurtez contre un dédain moqueur :
Ainsi, quitté du vent qui le soulève,
Comme le flot meurt à plat sur la grève,
Vide et muet, s’affaisse votre cœur.

Vous comprendrez cette rumeur étrange
Que produisit, dans un salon badaud,
Ce noble habit, mode de fée, ou d’ange,
Près des chiffons de Palmyre ou d’Herbault.
Dès que parut la royale étrangère,
Qu’environnait une lueur légère,
Le cercle entier fut soudain en émoi.
Quoi ! — Qu’est-ce ? — Holà ! — D’où vient cette inconnue ?
— Est-ce un fantôme ? — un masque ? On tremble, on hue ;
L’infante, au bruit, prit la fuite d’effroi.

De chambre en chambre on suit en vain sa trace :
Elle a gagné son asile secret.
Là, de la fée elle implorait sa grâce,
Versant des pleurs de honte et de regret.
Déjà la robe à sa place est rentrée ;
Et, reprenant sa grossière livrée,
Si follement déposée en ce coin,
Sans être vue, elle fuit désolée.