Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/164

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tu n’auras plus qu’à aller tout droit ; nous prendrons à gauche.

Vavîla monta sur le chariot au tonneau ; Lîpa et le vieillard sur l’autre. Ils partirent au pas, Vavîla en avant.

– Mon petit a souffert tout le jour, dit Lîpa. Il regardait de ses petits yeux et se taisait. Il voulait parler et ne pouvait pas. Seigneur, mon Dieu, Reine des cieux ! De chagrin, je tombais à chaque minute par terre. J’étais debout et je tombais près du lit. Dis-moi, grand-père, pourquoi un petit doit souffrir avant de mourir ? Quand une grande personne souffre, une femme ou un homme, leurs péchés leur sont pardonnés, mais pourquoi un enfant souffre-t-il, lorsqu’il n’a pas de péchés ? Pourquoi ?

– Eh ! qui le sait ! dit le vieillard.

Ils marchèrent une demi-heure sans parler.

– On ne peut pas tout savoir, le pourquoi et le comment, reprit le vieillard. Il est donné à l’oiseau deux ailes et non pas quatre, parce qu’avec deux il peut voler. De même il n’est pas donné à l’homme de tout savoir, mais la moitié seulement ou le quart des choses. Il sait juste ce qu’il lui faut pour vivre sa vie.

– Grand-père, il vaudra mieux que je marche. Maintenant mon cœur saute.

– Ça ne fait rien ; reste.