Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/203

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puits. Quand on fait marcher le cheval et que le treuil se met en mouvement, une poulie fait descendre une benne, tandis que l’autre monte ; et, quand on remonte la première benne, la seconde descend : c’est tout à fait comme un puits à deux seaux Bon ! J’étais assis dans la benne et j’allais bientôt arriver en bas, quand tout à coup, imaginez-vous cela, j’entends trrrr !… La chaîne s’était brisée et je dégringolais au diable avec la benne et le morceau de la chaîne. Je tombai ainsi d’une hauteur de trois toises, à plat, sur le ventre et sur la poitrine. La benne, plus pesante, était arrivée avant moi et je cognai contre elle avec cette épaule. Comme je gisais étourdi, pensant m’être tué, je vois venir un second malheur : la benne qui montait, ayant perdu son contrepoids, dégringole à son tour avec fracas… Instinctivement je me rapprochai de la muraille, et me ratatinai, m’attendant bien à ce que cette benne, avec toute sa vitesse, m’écrasât la tête. Je me rappelle mon papa, ma maman, Moguîlov, Groumacher, et je prie Dieu… Mais par bonheur !… C’est affreux de se rappeler cela.

Alexandre Ivânytch fit un effort pour sourire et se passa la main sur le front :

– Mais, par bonheur, elle tomba près de moi et ne m’effleura que ce côté. Mon habit, mon gilet furent déchirés, la peau emportée. La force avec