Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/247

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– Quoi ? demanda sombrement Ouzélkov.

– Qu’aussi mauvais qu’ait été le passé, il fut meilleur que ceci…

Châpkine toucha ses cheveux gris.

– Dans le temps, on ne songeait pas à l’heure de la mort… L’eût-on rencontrée elle-même, on pensait qu’on pourrait lui rendre des points, et maintenant… Enfin, que voulez-vous !…

La tristesse gagnait Ouzélkov. Soudain il aurait voulu pleurer, de même que, jadis, il aurait voulu aimer passionnément… Des larmes, lui semblait-il, eussent été rafraîchissantes, bonnes… Une moiteur venait à ses yeux ; une boule remontait déjà dans sa gorge ; mais Châpkine était auprès de lui. Il eut honte de paraître faible devant quelqu’un. Il se retourna brusquement et se dirigea vers l’église.

Ce ne fut qu’au bout de deux heures, après avoir conféré avec le staroste et examiné l’église, qu’il profita d’une minute pendant laquelle Châpkine s’oubliait à causer avec le prêtre, et il courut pleurer.

Il se glissa vers la tombe comme un voleur, en se cachant, regardant à tout instant derrière lui. Arrivé près d’elle, il s’adonna à sa tristesse. La petite tombe blanche le regardait pensivement, tristement, innocemment, comme si elle eût recouvert une enfant et non pas une femme divorcée et dépravée.