Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/71

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preuve que vous croyez à mon sincère attachement et que vous me regardez comme votre ami !… Mon ami ! reprit-il, se troublant de plus en plus et empêchant André Efîmytch de parler, je vous aime pour votre instruction et pour la noblesse de votre âme ; écoutez-moi, mon cher. Les préceptes de la science forcent les médecins à vous cacher la vérité, mais, moi, avec une franchise toute militaire, je dirai la vérité toute nue : Vous êtes malade ! Excusez-moi, mon cher, mais c’est la vérité. Tous ceux qui vous entourent l’ont remarqué depuis longtemps. Le docteur Eugène Fiôdorovitch me disait, à l’instant, qu’il vous est nécessaire pour votre santé de vous reposer et de vous distraire. C’est parfaitement exact. Bon ! Ces jours-ci, je prends un congé et je vais changer d’air. Prouvez-moi que vous êtes mon ami, partons ensemble ! Partons ! Secouons notre vieillesse !

– Je me sens très bien portant, dit André Efîmytch, rêveur. Je ne puis pas partir. Vous me permettrez de vous prouver mon amitié à un autre moment.

Partir sans savoir où, ni pourquoi ; laisser ses livres, sa bière, Dâriouchka ; changer brusquement l’ordre de sa vie établi depuis plus de vingt ans ; ces idées lui semblèrent, au premier abord, fantastiques et atroces.

Mais il se rappela la séance qui avait eu lieu à la