Page:Tcheng Kitong - Le Theatre des Chinois, 1e ed. Calmann Levy, 1886.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des fleurs. Qui n’admirerait les plumes de Tsoui qui ornent sa tête, les cheveux qui ombragent ses tempes comme un léger nuage ? Dès qu’un homme a été touché des attraits d’une femme, il voit sa figure en songe et la suit avec ardeur.

Depuis que j’ai vu Siao-Man, qui ressemble à une jeune immortelle du ciel de jade, ma pensée ne peut plus se détacher d’elle, pas même pendant mon sommeil ; j’oublie de prendre le thé et le riz, et madame Han ne dit pas un mot de ce mariage ! — À cette heure avancée de la nuit, la lune est brillante, l’air est pur. Depuis que je suis dans ce cabinet d’étude, la tristesse m’accable. Je vais jouer un air de ma guitare[1], (il parle à sa guitare.) Je t’invoque d’une voix suppliante : Souviens-toi que, pendant plusieurs années, je t’ai suivie, comme un ami fidèle, sur les lacs et sur les mers. Je vais jouer un air, jeune immortelle ! C’est dans ta ceinture, mince et svelte comme celle d’une vierge ; dans ton sein, nuancé comme celui d’un serpent ; dans ta gamme d’or, ton chevalet de jade, c’est dans tes sept cordes, pures comme le cristal, que réside toute la puissance de mes chants. O ciel ! puisse une brise heureuse recevoir les sons de ma guitare et les porter mollement aux oreilles de cette jeune beauté, qui semble formée de jade et pétrie de vermillon ! O ma guitare ! je te suspendrai dans ma chambre ; je t’offrirai des sacrifices aux quatre saisons de l’année, et je ne manquerai jamais de te saluer, soir et matin, pour te témoigner ma reconnaissance.

FAN-SOU.

Mademoiselle, promenons-nous à la dérobée.

  1. La guitare des Chinois a sept cordes ; il n’est pas ridicule d’en jouer.