Page:Tcheng Kitong - Le Theatre des Chinois, 1e ed. Calmann Levy, 1886.djvu/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’esprit humain ; et, si j’avais à définir l’homme, je dirais que c’est une intelligence qui se défie.

Shakspeare place la défiance au sommet de l’activité de la raison. Écoutez Hamlet interrogeant la destinée, et s’écriant :

« Oh ! prendre les armes contre l’outrageante fortune : arrêter cet océan de maux qui nous envahit ! Mourir et dormir : c’est tout. — Dormir, c’est-à-dire anéantir les tortures de mon cœur : dormir ! peut-être rêver ! Ah ! là est le problème : quels seront les rêves de ce sommeil de la mort ?.. C’est ici qu’il faut faire attention. Oui, certes ; qui voudrait supporter ce fardeau écrasant de la vie ?... Mais il y a cette terreur de quelque chose après la mort ; il y a cette terre inexplorée d’où personne n’est jamais revenu ! »

Voilà la défiance ! et ce sentiment est assez violent pour vaincre le dégoût de la vie dans une âme aussi lasse que l’est celle d’Hamlet.

La défiance est tellement le sentiment par excellence de l’esprit humain, que la foi religieuse qui vient du christianisme est présentée comme un