Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/228

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préparatoire ce que je dois vouloir pour moi, afin de traiter les autres sur cette mesure ; ce que je dois m’interdire à moi-même, et par conséquent m’interdire envers autrui, il me laisse à l’arbitraire de mes interprétations, peu soucieux de régler en moi l’acte et la volonté. Il n’a défini, ni mes droits, ni mes devoirs. Donc, point de principe régulateur. Donc, il m’est loisible ou de refuser aux autres ce que j’en attends pour moi-même, charité, déférence, consolation, secours et tous les biens do cette nature ; ou de m’abstenir de la violence, de l’insulte, des outrages, de la supercherie, du vol, comme je leur demande de s’en abstenir envers moi. Les païens, non encore éclairés par la foi, ne s’occupent guère d’accorder la volonté avec l’acte. Ou peut connaître le bien et le mal avec les seules lumières de la nature : mais on n’aura pas la connaissance que nous en donne la loi de Dieu. C’est à son flambeau, d’après les principes de la foi et sous l’œil d’un Dieu vengeur, que le chrétien apprend à mettre d’accord la conduite et les sentiments.

Par conséquent, le dieu de Marcion, tout révélé que je le suppose, n’a pu, en admettant même sa révélation, proférer sommairement le principe ici débattu, principe si laconique, environné de tant de ténèbres, mal compris encore, et laissé à l’arbitraire de mes interprétations, Faute d’une doctrine antérieure qui l’appuie et l’éclairé. Il n’en va pas de même de mon Créateur. Partout, autrefois comme aujourd’hui, il me fait une loi de protéger, d’aider, de nourrir le pauvre, l’orphelin, la veuve. « Partage ton pain avec celui qui a faim, » me dit-il par la bouche d’Isaïe. « Recueille sous ton toit l’indigent qui n’a point d’asile. Lorsque tu vois un homme nu, couvre-le. » Il trace ainsi le portrait du juste dans Ezéchiel. Il donnera son pain à celui « qui a faim ; il couvrira l’homme nu. » C’était m’enseigner suffisamment à pratiquer envers autrui, ce que je voulais qu’on pratiquât pour moi-même. Ces défenses : « Tu ne tueras point, — tu ne seras point adultère, — tu ne