Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/562

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de nos membres ne dureront pour les nécessités de la vie actuelle que jusqu’au moment où cette vie elle-même passera du temps à l’éternité, de même que « le corps animal sera converti en corps spirituel, celle chair mortelle revêtant l’immortalité, et cette chair corruptible l’incorruptibilité. » Mais aussitôt que la vie elle-même sera délivrée de ses nécessités, les membres seront délivrés pareillement de leurs fonctions. Ils n’en seront pas moins nécessaires toutefois, parce que tout délivrés qu’ils soient de leurs fonctions, ils sont gardés pour les jugements de Dieu, afin que chacun reçoive dans son corps selon qu’il a opéré. Le tribunal de Dieu réclame l’homme tout entier : il est clair que l’homme n’est pas tout entier s’il n’a ses membres dont la substance, mais non les fonctions, forment ce qu’il est ; à moins que peut-être tu ne soutiennes qu’un navire est parfait sans carène, sans proue, sans poupe, sans la solidité de toute sa charpente. Et cependant si nous avons vu plus d’une fois un navire brisé par la tempête ou ruiné par le temps, s’enorgueillir de sa réparation, après que tous ses membres ont été remisa neuf, nous inquiéterons-nous de l’habileté, de la volonté et des droits de Dieu ? Quoi ! si un maître riche et libéral fait réparer son navire uniquement par affection ou pour sa propre gloire, sans vouloir qu’il travaille désormais, diras-tu que l’assemblage de ses membres ne lui est pas nécessaire comme devenant inutile dès-lors, puisqu’il ne sert qu’à la conservation d’un vaisseau qui ne travaille plus.

Il s’agit donc de considérer uniquement ce point. Le Seigneur, en destinant l’homme au salut, y a-t-il destiné la chair ? Ou bien veut-il que cette même chair subsiste encore ? Alors tu ne dois pas prétendre, sous prétexte que ces membres seront inutiles, que la chair ne puisse revivre ; car une chose peut revivre et néanmoins ne servir ù rien. D’ailleurs on ne peut dire qu’elle demeure sans emploi, si elle n’existe pas. Au contraire, si elle existe, elle