Page:Thaly - Chants de l'Atlantique suivis de Le ciel des Antilles, 1928.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
SOUS LE CIEL DES ANTILLES
98


XXIII

LA LÉZARDE


Lézarde verte, ô petit fleuve merveilleux,
Tu cours, sous les bambous, derrière le Gros-Morne ;
Ta « maman d’leau[1] » jadis a charmé mon cœur morne,
J’ai vu cette sirène en tes flots lumineux.

Ah ! qu’ils sont loin les jours sauvages et joyeux
Où j’ignorais la mort et sa terrible borne ;
Après l’heure où rentrait le jaune capricorne,
On écoutait les contes tristes des aïeux.

Des champs de riz alors poussaient près de tes rives
Et douze négrillons de leurs notes plaintives
Dispersaient les essaims affamés des oiseaux.

Reviendrai-je jamais, par une heure trop chaude,
Quand le soleil décline, illuminant tes eaux,
Plonger dans tes bassins de pourpre et d’émeraude ?

  1. « Maman d’leau » sirène d’eau douce, habite les bassins des grandes rivières