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ii. — rivalen et blancheflor

pour me tourmenter ! *|| Ah ! seigneur Dieu, comment pourrai-je être délivrée de cette misère, de ce deuil ? C’est lui qui devrait me supplier de le retirer de telle peine, et non moi : *|| G 1055-8.car comment l’en requérir sans me honnir aussitôt *||, moi et toute ma parenté ? Certes, il remarquerait bien vite ma folie ; il me croirait coutumière de telles requêtes et me repousserait à grand honte ! Que faire pourtant ? À quoi bon ces plaintes ? Oui, il ne me reste plus que de m’ouvrir à lui. »

S chap. VIII.
G 731-51.
*|| Le tournoi a pris fin, la troupe des chevaliers quitte le champ et se disperse. « Par aventure (G) », Rivalen chevaucha vers le lieu où se tenait Blancheflor avec la belle troupe de ses damoiselles (S) ». « Il poussa son cheval plus près d’elle (G) », la salua par des paroles courtoises,

E si li dist : « Deus vus salt, bele !
— Sire, merci ! » dist la pucele[1] ;

*|| — Dieu vous sauve pareillement, et vous donne honneur et bénédiction, si du moins vous voulez amender le tort que vous nous avez fait.

*|| — Dame, dit Kanelangrès, quel tort vous ai-je donc fait ? *||

« Blancheflor répondit : « Vous êtes le seul ici, seigneur, à ne pas savoir que vous avez commis quelque tort en ce jour, et j’en suis marrie et irritée.[2] »

  1. J’ai réparé de mon mieux ces deux vers de l’original partiellement conservés par une fantaisie de Gottfried :

    « â, dé vûs sal, la bêle !
    « merzi ! dit la buzêle.

    Il est très douteux que l’emploi que fait ici Gottfried de l’article (la bêle) fût usuel en ancien français. (Voir Tobler, Vermischte Beitrœge zur französischen Grammatik, 3e série, p. 127.)

  2. S et G, si parfaitement d’accord en cet épisode, divergent pour cette réplique. En G, Blancheflor répond : « C’est à mon