Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/370

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Les autres membres ont été mus principalement par cette considération que le caractère essentiel de la peine de la détention, telle qu’elle apparaît dans le Code, est l’emprisonnement sans travail obligatoire ; qu’introduire le travail forcé dans la détention, c’était en quelque sorte faire disparaître cette peine qui, cependant, est souvent prononcée dans le Code ; que tout changement profond dans le code pénal était un danger qu’il ne fallait courir que quand il était nécessaire de le faire. Que c’était une chose très-grave que de modifier un grand nombre d’articles de ce code par occasion, et à propos de la loi des prisons.

M. le ministre de l’intérieur, entendu dans le sein de la Commission, a paru adhérer à cet avis.

En conséquence, nous avons l’ honneur de vous proposer d’ajouter à l’article 25 du projet, après ces mots : « Le travail est obligatoire pour tous les condamnés, à moins qu’ils n’en aient été dispensés par l’arrêt, » ceux-ci : « Ou qu’ils n’aient été condamnés en vertu de l’article 20 du code pénal. »

Elle vous propose également de retrancher, ainsi que l’avait fait la Commission de 1840, de l’art. 38 du projet, ces mots : « Sont abrogés les paragraphes 1 et 2 de l’article 20 du code. » Un membre a été plus loin. Il a soulevé la question de savoir si la dispense du travail obligatoire que le code pénal accorde dans la plupart des cas aux auteurs des crimes contre la sûreté de l’Etat, ne devait pas être étendue jusqu’aux auteurs des déhts politiques ? Si on soustrait les grands criminels au travail forcé, disait-il, pourquoi y astreindre les moindres ?

Si, en général, le principe du code pénal est de ne point contraindre au travail les auteurs des crimes contre la sûreté de l’Etat, pourquoi punir de cette manière les auteurs des délits qui ont le même caractère ?

On a répondu qu’il était impossible de tirer du code pénal une conclusion aussi rigoureuse ; que le code pénal n’avait point, connue on le prétendait, classé d’une manière absolue dans un rang spécial, par la nature de la peine, les auteurs des crimes contre la sûreté de l’État ; qu’en effet, il y avait quelques crimes qui, malgré qu’ils eussent plutôt le caractère de crime ordinaire que de crime politique, étaient cependant punis de la même manière que les crimes contre la sûreté de l’État ; qu’il arrivait quelquefois que des