Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/487

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paux intérêts du pays ou au soin de sa propre existence. Rien n’y a révélé jusqu’à présent une pensée unique et puissante, un plan arrêté et suivi. La volonté éclairée et énergique qui dirige toujours et contraint quelquefois les pouvoirs secondaires ne s’y est pas rencontrée.

La Commission, messieurs, eût cru manquer à son premier devoir envers vous et envers elle-même, si elle vous avait caché sur ce point sa pensée. Elle l’exprime en ce moment avec mesure, mais elle n’hésite pas à l’exprimer.

Elle croit qu’il fallait que ce qu’elle vient de dire fût dit, et elle le dit sans préoccupation de personnes ni de parti, par le simple et pur amour du hien public.

Tant que les choses se passeront ainsi, les améliorations de détails, les réformes administratives, les changements d’hommes, resteront, croyez-le, inefficaces. Les avis les plus salutaires seront perdus, les meilleures intentions deviendront stériles. Tout sera, au contraire, possible et presque facile, le jour où le gouvernement et les Chambres, prenant enfin en main la direction de cette grande affaire, la conduiront avec la résolution, l’attention et la suite qu’elle réclame.

INCIDENT RELATIF A L’EXPÉDITION DE LA KABYLIE

La Commission, avant de passer à la discussion des différents. crédits qui vous sont demandés, croit devoir vous entretenir d’un grave incident qui a eu lieu dans son sein. La Commission n’était réunie que depuis peu de temps, lorsqu’elle fut instruite qu’on préparait en Afrique une expédition ayant pour but d’entrer dans la Kabylie. Un pareil événement ne pouvait manquer de la surprendre et la préoccuper vivement ; car il était de nature à apporter des modifications profondes dans la situation des choses en Afrique ; il pouvait influer puissamment sur l'effectif, et par l’effectif, sur tous les crédits dont vous lui aviez remis l’examen.

La totalité de ses membres accueillit ces bruits avec regret, et tous semblèrent partager le désir que l’expédition n’eût pas lieu. Pour éclaircir ses doutes, la Commission pria M. le ministre de la guerre de se rendre dans son sein. Elle lui demanda si la nouvelle