Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/513

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posé de pauvres, comme Cheragas, par exemple, quatre ou cinq propriétaires riches s’étaient déjà fixé, il est arrivé que le village a fourni les ouvriers dont ces propriétaires avaient besoin, et que ceux ci, à leur tour, ont soutenu, par des salaires, les familles du village. Chacun a ainsi vécu, et tous bientôt pourront atteindre l’aisance. Yoilà ce que nous avions à dire à la Chambre sur la population agricole de la Mitidja et du Sahel.

La crise qui a désolé la province du centre n’a pas atteint les autres provinces ; là, les causes qui l’avaient fait naître à Alger ne se sont pas rencontrées. Les villes ne se sont développées que dans la proportion exacte des besoins, et c’est principalement du côté de la culture des terres que les capitaux semblent se diriger. Un certain nombre de villages, dans la province de Constantine et dans celle d’Oran, ont été fondés d’après le système que nous avons fait précédemment connaître, c’est-à-dire qu’ils ont été peuplés de familles pauvres que l’État a subventionnées. Presque tous ces villages ne se développent que très-lentement, et quelques-uns même ne se maintiennent qu’avec peine.

En dehors de ces villages, d’autres cultivateurs européens se sont établis dans des concessions plus ou moins grandes[1], sans subvention de l’État, mais, au contraire, en lui payant une rente ; ceux-là ont fait déjà de grands travaux ; ils ont bâti des maisons, creusé des puits, défriché des terres ; ils semblent prospérer, bien qu’ils fassent avec leurs seules ressources ce que les autres ne réussissent pas ou réussissent incomplètement à faire avec l’argent du Trésor. A côté de leurs concessions, beaucoup de concessions nouvelles sont demandées.

Toutefois, il faut le dire, ces établissements ne sont pas encore très-nombreux, et ils sont presque tous récents ; s’ils fournissent des lumières sur le sujet qui nous occupe, ils ne donnent point encore de certitude quant au système à suivre.

Au delà des zones maritimes, dans les territoires mixtes ou arabes, s’élèvent déjà un certain nombre de villes européennes, que la présence de notre armée a créées et fait vivre, et dont un petit nombre de cultivateurs habitent déjà la banlieue.

  1. Dans les environs d’Oran, 2,000 hectares ont ainsi été distribués en concessions de 4 à 100 hectares