Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/236

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qu’elle. » Et il se rappelait vivement Natacha, non comme autrefois, avec le charme seul, joyeux pour lui, mais, pour la première fois, il pensait à son âme. Il comprenait ses sentiments, ses souffrances, sa honte, son repentir. Pour la première fois, il comprenait toute la cruauté de sa rupture avec elle. « Si seulement il m’était possible de la voir une dernière fois. De la regarder une fois en face et de lui dire… » Et boire… boire… boire… oire… oire… boire… boire… boire ! La mouche tomba.

Et son attention se transporta soudain dans le monde de la réalité et du délire, dans lequel se passait quelque chose d’extraordinaire.

Dans ce monde toujours se reconstruisait sans se détruire un bâtiment quelconque… Quelque chose s’allonge… la chandelle brûle toujours entourée d’un cercle rouge…

La même chemise-sphinx est près de la porte, mais outre tout cela quelque chose grince, un vent frais entre et un nouveau sphinx blanc se dresse près de la porte. La tête de ce sphinx a le visage blanc, pâle et les yeux brillants de cette même Natacha, à qui il pensait tout à l’heure.

« Oh ! ce délire incessant est terrible ! » pensa le prince André en tâchant de chasser ce visage de son imagination. Mais ce visage était devant lui avec la force de la réalité, et il s’approchait. Le prince André voulait retourner au monde ancien de la pensée pure, mais il ne le pouvait, et le délire