Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/405

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pait d’un bout à l’autre et partout trouvait tout contraire aux prescriptions. Ainsi il rencontra le corps de Bogovoute dans la forêt, quand il faisait déjà grand jour et que, depuis longtemps, il aurait dû être avec Orlov Denissov. Ému et attristé de l’insuccès et supposant que la faute en était à quelqu’un, Toll s’approcha du commandant du corps et se mit à lui faire de sévères reproches, disant qu’un tel acte méritait la mort. Bogovoute, un vieux général martial, ordinairement calme, fatigué lui aussi de tous ces arrêts et des ordres contradictoires, à l’étonnement général, et tout à fait contre son caractère, devint furieux et répondit à Toll des choses désagréables.

— Je n’accepte de leçons de personne et avec mes soldats je saurai mourir aussi bien que les autres, dit-il ; et, avec une seule division, il partit en avant.

En sortant du camp sous les coups des Français, Bogovoute, ému et très courageux, ne comprenait pas s’il était utile ou non de prendre maintenant part à l’action avec une seule division : il allait tout droit et conduisait ses troupes sous les coups. Dans son état de colère, les boulets, les balles étaient précisément ce qu’il lui fallait.

Une des premières balles le tua, d’autres tuèrent plusieurs soldats, et, sans aucune utilité, sa division resta quelque temps sous le feu.