Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/162

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le mot magique. Il le prend, le prend et voilà : entre ses mains il se transforme en oiseau et s’envole. Et c’est impossible aussi de le tuer…

— Ah ! comme tu mens, Kisilov !

— Comment ! C’est la vraie vérité.

— Et si j’avais été le maître, une fois capturé, je l’aurais enterré vivant et percé avec un piquet de tremble. Combien de gens a-t-il fait tuer !

— Tout de même nous en viendrons à bout ! fit en bâillant le vieux soldat.

La conversation cessa, les soldats se préparèrent pour la nuit.

— Ah ! en voilà des étoiles ! Comme elles brillent ! On dirait que les femmes ont tendu leur toile ! dit un soldat en admirant la voie lactée.

— C’est bon signe pour la récolte, les enfants !

— Il faut apporter encore un peu de bois.

— On se chauffe le dos et le ventre est gelé. En voilà encore une histoire. Oh ! seigneur !

— Pourquoi pousses-tu ? Est-ce que le feu est pour toi tout seul ? En voilà un, il prend la place !…

Au milieu du silence qui s’établissait s’entendait le ronflement des dormeurs. D’autres se tournaient, se chauffaient, en causant de temps en temps.

À cent pas du bûcher éclataient des cris bruyants et gais.

— Oh ! comme on s’amuse dans la 5e compagnie, dit un soldat. Et il y en a du monde !

Un soldat se leva et alla à la 5e compagnie.