Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/44

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— Allons chez le colonel, dis-je. Il se met à crier. Et il y en avait quatre. Ils se jettent sur moi avec les épées. Je lève ma hache : — Qu’est-ce que c’est ! Christ soit avec nous ! s’écria Tikhone en agitant la main, fronçant les sourcils et bombant la poitrine.

— C’est ça ! Nous avons vu de là-haut comment tu t’es enfui à travers la mare ! fit le capitaine en clignant des yeux.

Pétia avait grande envie de rire, mais il voyait que tous s’en retenaient. Ses yeux couraient du visage de Tikhone à celui du capitaine et à Denissov, ne comprenant pas ce que tout cela signifiait.

— Ne fais pas le bouffon ou l’imbécile, dit Denissov en toussotant avec colère. Pou’quoi n’as-tu pas amené le p’emier ?

Tikhone, d’une main se gratta le dos, de l’autre la tête et, tout d’un coup, tout son visage s’épanouit en un sourire bonasse, brillant, qui montra le vide d’une dent. Denissov sourit, Pétia éclata d’un rire gai auquel fit chorus Tikhone lui-même.

— Mais, quoi ! Il était tout à fait mauvais, dit Tikhone. L’habit même ne valait rien. À quoi bon l’amener ? Et il était insolent, Votre Seigneurie. Comment, dit-il, moi le fils d’un général ! Je n’irai pas !

— Animal ! fit Denissov. Il me fallait l’inte’oger.